samedi 5 janvier 2013

La ménagerie de Julien Salaud


L'artiste de 35 ans, installé à Orléans, place le monde animal au cœur de son processus créatif. Ses œuvres sont à découvrir jusqu'au 28 février au deuxième étage du Château de Chambord (41).


Un cerf "momifié" © ÉR
 
Un oiseau noir avec des yeux en strass rouge et une biche momifiée vêtue d'une armure de perles qui côtoient des fresques murales composées de fils blancs disposés sur un fond noir et tendus entre des clous représentant des créatures mi-homme, mi-animal, tout cela sous une lumière tamisée…. Julien Salaud affiche un univers bien à lui et l'exposition "Bambi et les danseurs étoiles, opus 2" peut surprendre au premier abord. Difficile, par exemple, de rester de marbre face à l'arbre que le jeune homme a choisi de suspendre en l'air, au-dessus d'un cervidé naturalisé, et dont les branches sont garnies de têtes de faisans morts qui tournent dans le vide !  "La peau est l'élément anatomique qui m'intéresse le plus. Je momifie les têtes et je donne les corps à manger," plaisante l'intéressé. "Je ne chasse pas, je récupère des massacres sur des brocantes et des faisans chassés en forêt de Rambouillet !" Pour expliquer davantage son art, il cite plus sérieusement l'ethno-astronome Chantal Jègues Wolkiewiez, la philosophe-essayiste  Élisabeth de Fontenay et l'anthropologue Claude Lévi-Strauss, des intellectuels qui se sont notamment intéressés à la cause animale et aux constellations. Il évoque la Shoah et les camps de concentration pendant la Seconde guerre mondiale,  les fours crématoires bâtis sur le modèle des abattoirs industriels américains. Il parle aussi volontiers de son homosexualité et de son nom de famille difficile à porter qui lui ont valu des brimades et moqueries, plus jeune, dans la cour de l'école.



L'artiste utilise de la peinture noire écologique © ÉR

Julien Salaud n'est pas diplômé des Beaux-Arts et confie d'ailleurs qu'il a "essayé plein de trucs". Pour preuve : il dispose d'une formation de biologiste, d'ethnologue et d'historien. Il a également étudié la faune sauvage en Guyane aux côtés d'une association de protection de l'environnement, avant de se lancer dans une carrière artistique qui s'annonce déjà prometteuse. Certains le présentent comme la "star" de demain. Il faut dire que tout a démarré sur les chapeaux de roue. En 2010, Julien Salaud a participé au 55e salon de Montrouge où il a remporté le prix du Conseil Général des Hauts-de-Seine. En 2012, il a intégré l'armée des "maîtres du désordre" au  musée du Quai Branly, à Paris, et a transformé la salle Alice Guy du Palais de Tokyo, à Paris, en grotte stellaire. Ses créations sont en outre visibles de façon permanente dans la galerie Suzanne Tarasiève, dans le IIIe arrondissement de la capitale. "Les clous que j'utilise, c'est ce qui transperce et les fils, eux, mettent en cohésion les éléments," détaille-t-il lorsqu'on le questionne à nouveau. "Je mets ainsi en relation toutes ces choses et j'essaie de proposer un travail où plus rien n'est étranger. C'est là un système de construction symbolique. Je tente de rendre les frontières floues pour diriger les gens vers une autre forme de tolérance et de liberté, et pour développer leur imaginaire. Les animaux offrent une vision panoramique sur ce que nous sommes. Ce sont les premiers êtres qui sont le plus souvent exclus de la société. Ce n'est pas parce que vous mangez un animal que vous ne devez pas le respecter."

Informations au 02.54.50.40.00. Ou sur www.chambord.org.
Pour en savoir plus sur Julien Salaud : http://julien-salaud.info/



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